
Depuis lundi, Nidhal O., un Tunisien de 26 ans, est jugé à Paris pour des faits d’agressions sexuelles et tentatives de viols commis contre 6 femmes en l’espace de trois jours en décembre 2023. Le verdict est attendu ce vendredi.
Pour Elsa (le prénom a été changé), il n’y a désormais qu’une seule façon de s’asseoir dans le métro : « Les bras croisés, le manteau fermé et le regard vers le sol », énumère-t-elle. « Au moindre truc, je suis en alerte », reprend la jeune femme, qui ne sort plus sans sa bombe lacrymogène. La raison d’une cette « hypervigilance » ? Le 5 décembre 2023, un peu après 23 heures, elle a été victime d’une agression sexuelle dans les couloirs de la station Miromesnil alors qu’elle effectuait le changement entre la ligne 13 et la 9. Au téléphone avec sa sœur, l’étudiante de 18 ans est presque arrivée au niveau du quai lorsqu’elle croise la route d’un homme vêtu d’une veste verte. « Il me dépasse et d’un coup je sens qu’il m’agrippe fort le bras par-derrière et m’entraîne vers le mur », se souvient Elsa. Rapidement, elle se retrouve coincée avec son agresseur qui appuie avec sa main sur sa poitrine. Terrifiée, Elsa croise le regard d’un sexagénaire qui se trouve à quelques mètres d’elle. « Je crie à l’aide, se souvient-elle. Mais au lieu d’intervenir, il m’a tourné le dos et a regardé ailleurs comme si de rien était. »
« J’étais tétanisée »
Coincée face à son agresseur, elle se sent incapable de bouger. « J’étais tétanisée, mon corps était figé comme une pierre. Tout ce qu’il me restait était ma voix alors j’ai hurlé le plus fort possible. Crier, c’était une façon de survivre. » Un cri qui est suffisamment puissant pour repousser l’homme qui recule d’un pas. Elsa, elle, en profite pour s’enfuir et s’engouffrer dans une rame de métro. Prostrée sur un strapontin, Elsa peine à comprendre ce qu’il vient de se passer.
Quelques jours plus tard, elle apprendra qu’elle est la première des six victimes de Nidhal O. « Dans mon malheur, je me dis que mon agression a été la plus soft, souffle-t-elle. Car après, c’est monté crescendo. » Depuis lundi, cet homme, un Tunisien de 26 ans, est jugé, à huis clos, devant la cour criminelle de Paris pour des faits d’agressions sexuelles et de tentatives de viol, commis entre le 5 et 8 décembre 2023, dont quatre ont été commis en l’espace de 7 heures dans le métro parisien. Une heure après Elsa, c’est à la station de métro Temple qu’une autre femme, âgée de 31 ans, prend la fuite après avoir senti les mains d’un homme lui toucher les fesses. Les caméras de la RATP permettent d’identifier un suspect : il s’agit là encore de Nidhal O. Six heures plus tard, l’accusé frappe à nouveau dans la ligne 3 du métro. Et cette fois, c’est Nathalie (le prénom a été modifié), 50 ans, qui va faire les frais de la frénésie sexuelle de cet homme au petit matin alors qu’elle est en route pour le travail.
« Je vais avoir une relation avec toi »
Après avoir croisé son regard insistant dans la rame, elle sort à la station Quatre-Septembre. Très vite, elle comprend qu’il la suit. Et alors qu’elle monte des escaliers, il la plaque contre le mur et lui touche le sexe par-dessus ses vêtements. Comme Elsa, la quinquagénaire crie de toutes ses forces et parvient à le mettre en fuite. « Ma cliente a été désignée et chassée comme une proie dans les transports en commun, c’est extrêmement choquant », réagit son avocat Me Paul Nafilyan, qui dénonce « une véritable volonté de l’auteur de passer à l’acte ».
Il ne faudra pas plus de plus de quinze minutes pour que Nidhal O. se trouve une autre cible. Le mode opératoire est à peu près le même : toujours sur la ligne 3, il se lance à la poursuite d’une autre femme, âgée de 51 ans et parvient à la faire chuter au sol. Il tente alors de lui enlever son pantalon en l’empêchant de crier, sa main plaquée sur la bouche de la victime. Nathalie se débat, le griffe au visage et hurle de toutes ses forces. Une scène de terreur que la justice qualifie non plus d’agression sexuelle mais de tentative de viol. Alerté par les cris de la victime, un usager du métro crie « police » pour faire fuir le jeune homme.
Après une nouvelle agression sur une adolescente de 17 ans à la station Palais-Royal, le 7 décembre au soir, c’est finalement à l’extérieur du métro qu’il sera interpellé, le 8 décembre. Cette nuit-là, vers 2 heures du matin, Nidhal O. suit une femme de 27 ans jusqu’au 5e étage de son immeuble et s’engouffre dans son appartement alors qu’elle vient d’ouvrir la porte. Il pousse sa victime sur son lit, enlève très rapidement son tee-shirt et se jette sur elle. « Tu vas y passer, je vais avoir une relation avec toi », menace-t-il. Mais cette dernière se débat et crie de toutes ses forces alertant un voisin qui parviendra à le maîtriser avant l’arrivée des policiers.
« Agressif » et « intolérant à la frustration »
Arrivé en France quelques mois plus tôt, après avoir été expulsé de Belgique où il a été condamné pour des violences, le jeune homme, accro au cannabis, semble errer dans les rues de la capitale où il se trouve en situation irrégulière.
Un point sur lequel insiste l’avocat d’Elsa, Me Louis Cailliez, tout en dénonçant l’attitude de l’accusé depuis le début du procès, qui « oscille entre propos incohérents et réponses indécentes ». « L’absence totale d’empathie manifestée à l’audience par ce prédateur clandestin rend la perspective d’une future remise en liberté terrifiante : ma cliente espère qu’il sera expulsé au terme de sa peine », insiste le pénaliste.
Du côté de la défense, on ne conteste pas les déclarations des plaignantes. « Mon client a commis les faits, c’est clair et net », réagit Me Seydi Ba. Mais pour lui, son client n’a pas sa place devant la cour criminelle. « Il tient des propos incohérents, il a de vrais troubles psychiatriques, insiste le pénaliste. On peut véritablement questionner le fait qu’il comparaisse devant la justice et qu’il reparte en détention, dont le seul effet sera d’accentuer ses problèmes mentaux. »
Si les psychiatres le décrivent comme « impulsif », « agressif », « intolérant à la frustration » ou encore « antisocial », ils n’ont pas décelé chez lui d’anomalies sévères sur le plan psychiatrique et ont conclu que son discernement n’était ni aboli, ni altéré au moment des faits. Nidhal O. encourt 15 ans de prison.
Le verdict est attendu ce vendredi