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Mort d’Ibrahima Bah à Villiers-le-Bel : les policiers mis en cause devraient échapper à un procès

By 21 mars 2025juin 10th, 2025Actualités
Voiture de police cailliez

Cinq ans et demi après l’accident à moto qui a coûté la vie à Ibrahima Bah à Villiers-le-Bel, une ordonnance de non-lieu devrait être rendue au bénéfice des policiers impliqués. La famille du jeune homme de 22 ans affirme que les fonctionnaires lui ont barré la route, ce qu’ils ont toujours contesté.

IBRAHIMA BAH avait trouvé la mort à moto à 22 ans devant la cité de la Cerisaie, à Villiers-le-Bel. Le 6 octobre 2019, un dimanche soir, il avait percuté de plein fouet un poteau en arrivant sur le lieu d’une intervention de police qui se terminait et à laquelle il était totalement étranger. Cinq ans et demi après le drame, les trois policiers impliqués dans l’accident, accusés par la famille de la victime d’avoir barré le passage à la moto avec leur fourgon et provoqué l’accident, ce qu’ils ont toujours contesté, devraient faire l’objet d’un non-lieu.

Cette perspective se dessine désormais clairement après l’avis de fin d’information judiciaire rendu récemment par le juge d’instruction. Or, les policiers n’ont jamais été mis en examen dans ce dossier et sont restés sous le statut de té- moin assisté, faute de charges suffisantes réunies à leur encontre. Une situation juridique qui exclue ainsi de les renvoyer devant un tribunal.

La reconstitution de 2023 n’a pas fait bouger les lignes

« Nous allons vers un non-lieu, tout porte à le penser », admet aujourd’hui l’avocat de la famille, Me Vincent Brengarth, qui avait pourtant réussi à obtenir la tenue d’une reconstitution sur les lieux du drame. Celle-ci s’est déroulée fin septembre 2023, devant la Cerisaie. Il s’agissait de comprendre dans quelle situation le conducteur du fourgon avait redémarré et bifurqué sur sa droite au moment même où arrivait la motocross roulant à 50 km/h et de visualiser quelle place il restait à Ibrahima Bah pour passer.

« La reconstitution avait ouvert une voie qui n’a pas été saisie par le juge d’instruction, regrette Me Vincent Brengarth. Il en résultait pourtant de forts doutes sur le récit des policiers », estime-t-il. Pour la sœur d’Ibrahima, Hadja, la reconstitution avait aussi révélé des contradictions dans les propos de ces derniers. Elle évoque même les « mensonges » du conducteur du fourgon. « Il a dit qu’il voulait éviter un terre-plein pour expliquer qu’il bifurque sur la droite, mais il n’y a pas de terre-plein ! Les policiers ont également assuré ne pas avoir entendu la moto arriver. Nous sommes tous montés dans le fourgon pour tester et nous l’avons clairement entendue… Pour nous, la perspective d’un non-lieu n’est pas acceptable. Cette action de bifurquer à droite était volontaire. Peut-être pas pour tuer, mais pour l’arrêter », confie-t-elle, avouant aussi avoir vécu la reconstitution « comme un déchirement. »

Son avocat regrette par ailleurs la succession des juges dans cette affaire. « Le magistrat instructeur a encore changé et celui qui va rendre la décision n’est pas celui qui a instruit l’affaire. Cela crée le trouble parmi les proches. Il y a un manque de confiance qui s’est construit, sur le fond, mais aussi sur la forme, ce qui accentue encore davantage la suspicion et le mécontentement », regrettet-il, conscient que « la famille est excédée ».

« Ils n’ont pas fait barrage à la moto »

La décision de non-lieu pourrait intervenir avant l’été, selon Me Louis Cailliez, avocat des policiers, qui a demandé au nouveau juge, dans ses observations, la confirmation du statut de témoin assisté de ses clients. « Je suis très serein. Je pense que l’on se dirige vers un non-lieu », estime également l’avocat pour qui la reconstitution avait selon lui a renforcé la position des policiers. « Je trouve qu’elle avait conforté les arguments de la défense, et permis d’écarter les rares doutes qui pouvaient subsister », considère l’avocat des fonctionnaires.

« Être in situ a permis de voir ce qui était crédible ou pas », indique Me Louis Cailliez. Selon lui, la reconstitution a permis de confirmer que le véhicule de police avait laissé au motard la place nécessaire pour passer, « qu’ils n’ont pas fait barrage à la moto », soulignant au passage « la conduite dangereuse d’Ibrahima Bah ». Il rappelle qu’il n’y a pas eu de choc entre le fourgon de police et la moto, qui a glissé et a été retrouvée plus loin sur la chaussée, ce qui laisse supposer que la victime avait la place de passer. Pour lui, les fonctionnaires de police n’ont pas fait de faute de conduite causant l’accident qui résulte, selon lui, « d’une perte de contrôle individuelle ».

L’accident s’était produit en dehors du champ des camé- ras, au carrefour du boulevard Salvador-Allende et de l’allée des Bleuets. Trois véhicules de police achevaient ce soir-là une intervention pour un refus d’obtempérer. À l’arrivée d’Ibrahima Bah casqué sur sa moto, un fourgon de police s’était déplacé sur sa droite pour quitter les lieux de l’intervention. Le jeune Sarcellois s’était alors engagé sur le trottoir pour l’éviter. C’est là qu’il avait heurté violemment un poteau. Malgré un massage cardiaque des policiers, il décédera 1 h 30 plus tard à l’hôpital.

Source : Le Parisien